01/05/2013

Des mots pour une histoire


Des mots (Judoka-Carioca-Pivoine-Chignon-Calligraphier-Origami-Baleinier-Bonzaï-Mont Fuji-Cerisier-Wasabi) et deux personnages (Violetta et Tony) pour faire une histoire : 

(Les mots sont ici pris dans l’ordre inverse de leur proposition)

Dans la rue Tony apostrophe sa compagne Violetta car la moutarde, plus fort, le wasabi lui monte au nez. Il n'a rien contre Violetta non, il souhaite plutôt lui exprimer la colère qui l'anime à la vue de ce pompeux cornichon de Jean Reno, un acteur qui fut 'wannabe',qui est désormais 'has-been', ce qui ne l'empêche pas d'être à l'affiche d'une comédie romantique, affiche que vient de voir Tony. C'est en ces termes que le jeune homme livre ses impressions courroucées à sa dulcinée : ' Putain nan mais il nous prend vraiment pour des cons ce Jean Reno, déjà qu'il est pas bon dans les films d'action, il tente maintenant d'exporter son physique bovin vers la comédie romantique, bonjour les transports amoureux ! Il a aucune finesse ce mec, ses 'punchlines' c'est carrément le cerisier qui écrabouille le gâteau, je suis certain que ça va faire un bide ce film, franchement c'est vraiment gâcher de la pellicule...' C'est alors que Violetta, constatant que son compagnon prend ceci beaucoup trop à cœur, remarque avec légéreté :' Tiens en parlant de pellicule, ce matin je suis allée chercher les photos du voyage au Japon chez le photographe, et en fait l'enveloppe, c'est de la marque Fuji, j'ai trouvé ça très adéquat et un peu cocasse, vu qu'on a mitraillé le fameux mont éponyme là-bas...' Tony se calme un peu à l'évocation de ces vacances récentes, et pense qu'il lui faudra arroser son bonsaï en rentrant à l'appartement, cette attention portée à ce frêle arbre le divertira un temps de sa conscience trop aiguë de l'absurdité de l'existence. En effet, Tony est un dessinateur humble et talentueux qui peine depuis plusieurs années à vivre de sa passion, alors qu'il constate que d’autres personnes moins talentueuses mais également moins humbles ont fait carrière dans différents domaines artistiques. Le jeune homme idéaliste traque le sens et la justice comme le baleinier Achab traque la baleine blanche dans la mer immense, avec acharnement. Parfois découragé  il se dit que la vie c’est comme les cocottes en origami des gamins, tu dis un numéro, puis on te lit un destin calligraphié au dos d’une des faces de la cocotte, maudit bic ! Mais alors dans ce bordel Tony guette les fragments de la beauté du monde, par exemple dans le métro le chignon d’une fille dont il ne verra pas le visage, ou bien au musée une peinture de pivoines d’un artiste chinois du XVIIème siècle. Certes jamais de quoi se mettre à danser la carioca, il s’agit de plaisirs plus subtils, qui font accéder à la volupté et affutent l’esprit, jusqu’à faire de son possesseur un judoka mental…BAM ! Bravo le judoka ! Voilà que Tony, trop affairé à contempler un lavomatic à la façade en verre et à l’intérieur blanc, se cogne la tête sur un poteau. Violetta éclate de rire.