09/10/2013

Poème de marche

Sortir de chez soi et, dans le sens contraire des aiguilles d’une montre, faire le tour du pâté d’immeubles, de maisons, du champ s’il on est à la campagne ; le poème est composé et appris par cœur le temps, et uniquement le temps, du parcours. Une fois revenu chez soi, on  le couche sur papier sans y apporter de retouches.
Un poème de marche est un poème composé sur le motif et en déplacement :

J'appuie sur le bouton et la porte de l'immeuble se démagnétise
Je m'arrête sur la marche à l'extérieur car je me sens déjà happé par l'habitude
J'inspire profondément, observe un peu le ciel gris et je me mets à marcher lentement
Moi le citadin souvent pressé je ressens à ce moment une affinité plus grande
avec la mauvaise herbe qui pousse entre les dalles de béton
Par terre un jeu à gratter astro signe capricorne pour peut-être
un peu de surprise dans une trajectoire
Et cette carte de V'lille, là, tombée d'une poche ou jetée ?
Mon pas ralenti et mon attitude contemplative me valent le regard inquiet
d'une jeune mère de famille
Je tourne à gauche, je me penche pour identifier un emballage
de chevillère Nike pour 14 euros
Un mec, la cinquantaine, se presse de rentrer chez lui pour manger sa pizza
Le garage silmat à l'architecture des années 60 attend sa démolition, autorisée
depuis le 11 août 2011
Un peu plus loin une carte du quartier au dos d'un emplacement publicitaire
mais je m'en fous
Après le virage, au sol une vingtaine de canettes vides Kanterbrau, Koenigsbier et 1664
éparpillées à côté d'un sac plastique blanc dans un recoin de l'imposant et moderne poste de transformation haute tension.
Puis la porte d'entrée de l'immeuble ou réside un jeune homme de mon village d'origine qui essaie toujours de m'éviter. J'ai envie de sonner.

Je tourne, des schtroumpfs gélifiés achèvent de se décomposer dans une flaque d'eau et si personne n'enlève cette peau de banane à l'entrée de mon immeuble, je pourrais la voir se 'bio-dégrader' jour après jour.